De l’île de France à la Normandie : La conquête à l’Ouest
De l’île de France à la Normandie : La conquête à l’Ouest
Sur la butte, ils s’étaient tant enivrés de gouttes d’or, ce vin de roi élevé sur la pente lutécienne, comme ils avaient succombé aux charmes de la fée verte, cette absinthe assommoir des nuits sans matin. Les chenapans de l’art s’étiolaient parfois, quand ils ne s’abîmaient, au bout de ces embuscades troubles. Encanaillés dans les cabarets et autres tripots où régnaient des chats maigres et noirs et quelques gueuses goulues et divines, ils voulaient désormais se frotter à des infinis silencieux, des paysages muets, des rencontres fortuites. Les Cézanne, Monet, Courbet, Boudin, Renoir, Degas, Bazille, Pissarot, d’autres encore, ont alors ressenti l’impérieux besoin de prendre le large et d’aller s’y nourrir.
Ils suivraient la douce pente du fleuve pour aboutir aux vagues. Les impressionnistes, associés ou solitaires, s’égayeraient de jardins épanouis en villages resserrés, de plaines ouvertes en ports calfeutrés, d’amitiés turbulentes en complicités taiseuses.
Natures mortes, paysages, portraits, s’empileraient dans une profusion féconde et installeraient, dans le plus grand désordre revendiqué, des noms dans la mémoire picturale. Avec Montmartre, Auvers, Giverny, Honfleur, Etretat accéderaient à ce Panthéon à construire cette troupe d’insoumis, qui, avec une palette pour seule arme, bousculeraient, jusqu’à la démesure, la peinture.
Le siècle voulait qu’on avançât. Les impressionnistes le prirent au mot, au grand galop. Ils illumineraient un jour tant de musées au monde. En ces années pressées, ils ont trouvé entre Ile-de-France et Normandie, les puits sans fond qui allaient étancher leur génie.