La Vision dévoilée, quand Debussy accompagne les impressionnistes

La Vision dévoilée, quand Debussy accompagne les impressionnistes

Claire Luquiens est flûtiste concertiste depuis plus de 15 ans. Habituée à jouer au sein des plus grands ensembles parisiens, cette virtuose a délaissé ces prestigieux orchestres le temps d’un enregistrement. Retour sur une expérience inédite qui a permis de réunir Debussy et les peintres du XIXe siècle.

Pouvez-vous nous présenter le morceau que vous avez interprété pour « habiller » l’espace 6 du nouveau parcours culturel du château « Vision impressionniste ?

Il s’agit d’un morceau de Debussy intitulé « Syrinx », écrit à l’origine pour la pièce de théâtre Psyché. Mais il était tellement extraordinaire qu’il est entré au répertoire de tous les flûtistes.

Qu’est-ce qui rend ce morceau si particulier ?

Techniquement, c’est une pièce qui ne repose pas sur des gammes tonales, mais sur des modes avec beaucoup de chromatisme. Il dégage de fait une certaine magie, quelque chose de « planant », de très fluide. Nous, flûtistes nous sommes bien content que Debussy existe !

Pour quelle raison précisément ?

Jusqu’au milieu du XIXe siècle, les flûtes traversières étaient en bois. Or à cette époque, un musicien et facteur d’instruments de musique bavarois du nom de Théobald Boehm a inventé la première flûte en métal. Cette évolution technique a permis d’augmenter la puissance de l’instrument, mais aussi son nombre de clés. Grâce à cela, la variété de sons couverts par la flûte a été considérablement accrue.

On ne saisit pas très bien le rapport avec Debussy…

Debussy était contemporain de Boehm. Il est un des premiers compositeurs à s’être saisi de cette révolution. Il a apporté de nouvelles couleurs harmoniques à la flûtée, légères et raffinée, mais également dotées d’une identité très forte.

Avez-vous déjà participé à un projet tel que celui du château d’Auvers ?

Non, c’est la première fois que l’on me demande de faire un enregistrement de ce type. D’ordinaire, je joue plutôt avec de grands ensembles, comme l’orchestre de l’Opéra de Paris, ou Le Balcon, dans lequel je suis flûte solo. Il m’arrive également de me produire durant des expositions, comme celle d’Irving Penn récemment. C’était donc une première pour moi.

Comment s’est passé l’enregistrement ?

Très bien. François Leymarie, le designer sonore du parcours culturel du château, m’a envoyé une vidéo pour que je puisse me familiariser avec la scénographie de l’espace avant de jouer. Cela m’a beaucoup aidé. Connaître le rythme de défilement des images, ainsi que les différents fondus, m’a en effet été utile pour adapter mon interprétation. Notamment pour savoir comment poser les silences dans le morceau. A l’arrivée, je trouve qu’une certaine harmonie se dégage de l’ensemble produit.